Anatomie d’un unboxing beauté.

NOUVELLE PASSION : égrener les unboxing de coffrets beauté « My Little Box ».

Recevant, chaque 15 du mois depuis le début de cette année, le coffret beauté proposé par My Little Paris, je ne sais pas ce qui me rend le plus impatiente, de la box elle-même, ses illustrations cheesy, son esprit girly et ses produits parfois au poil (j’ai investi dans certains) ou le plaisir inépuisable et sans cesse renouvelé de guetter les unboxings sans originalité et sans saveur de mes congénères. Qui fera la meilleure estimation chiffrée du montant des produits fournis, qui parviendra à faire le meilleur trait d’esprit, qui saura élever et politiser le débat (c’est arrivé, trust me on this one)… Tout compte fait, la réponse est dans la question.

C’est parti pour un tuto “Coucou les filles”.

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STEP ONE : Commencer par un propos introductif un peu indigent indiquant :

–       le lieu et la tenue dans laquelle vous vous étiez quand votre facteur a livré le colis (les plus chics d’entre vous diront « coursier ») – relever au passage l’effarouchement provoqué auprès dudit facteur/coursier lorsque vous auriez, selon la légende consacrée, poussé des hurlements d’hystérie (témoignant une belle intériorisation des tropes mysogynes que l’on retrouve, entre autres, dans la pub zalando)

–       votre impatience/trépignation à l’idée d’une longue journée de travail, du calvaire de l’open-office sans avoir eu le temps d’ouvrir votre précieux avant de courir attraper votre métro.

Exemple glâné au hasard d’une recherche Hellocoton

– Vient ensuite la première photo, celle du colis fermé, puis de la boîte fermée (il y a une raison à cela, cf. infra).

– Histoire d’allécher encore plus votre lecteur (ou lectrice), faire une petite phrase très #dansedesmots, jouant sur le thème développé par My Little Paris dans son coffret mensuel. Exemples :

« ce mois-ci, le printemps s’invite dans ma salle de bains » (Little box d’avril, thème: printemps)

« j’ai monté les marches cannoises grâce à My Little Box » / « je viens de recevoir mon accréditation pour aller à Cannes, hihi » (Little Box de mai, thème: Festival de Cannes)

… quitte à parfois laisser rapidement transparaître votre déception.

« ce mois-ci, la Little Box devait nous emmener à New York mais mes espoirs sont restés sur le tarmac » – paging Stéphane Mallarmé (Little Box de mars, thème: New York)

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STEP DEUX : Le débrief. C’est la raison d’être de l’exercice, la partie la plus soignée, introduite souvent par un “sans plus attendre”. Sans plus attendre, donc :

–       commencer par le compliment d’usage destiné à l’illustratrice Kanako, dont vous pourrez, au choix (ou tout ensemble) vanter le style « frais », « féminin », « élégant » ou « girly ». Mmmkay. Le plus beau compliment de ce mois revient à Mademoiselle Macaron : la boîte, si jolie, lui servira désormais à ranger ses tampax (véridique et un joli sens du second degré).

–       dresser la liste des produits, en l’assortissant toutefois d’une bannière « spoiler alert », comme si vous alliez raconter la fin de Lost. Notez que je comprends mieux cette précaution depuis qu’une malheureuse s’est fait tancer par une congénère sur Hellocoton, car l’unboxing beauté a des règles.

Rule #1 of the Beauty Box: you don’t talk about the beauty box.

– chaque produit doit venir avec son illustration (hé, ce serait pas de l’unboxing, sinon) et un petit descriptif personnalisé. La plupart se contentant de photos-téléphone sur la table de la cuisine, faire la différence passe évidemment par le pouvoir de suggestion de la mise en scène. J’en veux pour preuve l’unboxing performé avec brio par “HelloDy” (oui…) le mois dernier, proposant une mise en scène de chaque produit dans un pot de fleur (le thème était le printemps), mention spéciale au gaspacho placé dans sa corbeille à tomates et à la première image, directement tirée du site officiel de Ségolène Royal en 2008 <3

– l’avis personnel, sous forme de bilan, où il est d’usage de crier sa déception d’avoir reçu un soin antirides à 22 ans, une coque d’iPhone quand on est sur Androïd, ou un produit l’Oréal pour celles qui espéraient vraiment recevoir du Shiseido et du La Prairie pour 13€ par mois. En quelques lignes, on est passé de l’hystérie collective à la déception aigrie, sans doute en raison du fait que ces coffrets beautay arrivent en plein PMS (histoire de rester dans la même grille d’analyse cultivée par ces unboxings)

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STEP THREE : Pour finir, afin de passer du personnel à l’objectif, proposer un bilan chiffré histoire de voir « si on en a pour notre argent » – ce qui me rappelle invariablement la façon dont ma mamie tend la main pour attendre sa monnaie au supermarché, mais je pardonne à ma mamie, parce qu’elle a vécu pendant la guerre (et parce que j’aime ma mamie). Plusieurs écoles s’affrontent :

–       l’école du « full-size » (il faut savoir que les abonnées aux coffrets beauté sont en fait une secte ayant développé un idiolecte propre, c’est hallucinant) : il s’agit de faire le ratio miniatures / taille normale dans chaque box, le Mal prenant la forme de l’échantillon estampillé “ne peut être vendu séparément”. Le produit dedans reste le même, mais il en va d’une question de principe moral.

–       l’école comparatiste : celle qui sont abonnées à « My Little Box », « JolieBox » et « GlossyBox » et qui, du coup, crient leur désespoir de retrouver dans son coffret le produit proposé par la concurrence parfois le même mois. C’est-à-dire que le concept étant de tester des produits de façon ludique, pour un prix réduit, je voix plus bien l’avantage économique de s’en mettre pour plus de 40 tickets par mois de miniatures de shampooings, cette démarche me laisse perplexe.

–       l’école de la calculatrice (Marine Le Pen désapprouve), consistant à indiquer le prix de chaque produit, parfois en fonction de leur prix “full-size”, dans une démarche comptable se voulant objective. Je garde ça sous le coude pour expliquer à mes élèves que l’argument par le chiffre n’est pas plus objectif qu’un autre argument puisque je n’ai jamais trouvé deux fois le même résultat (et pourtant j’en ai épluché, des blogs beauté à fond rose / police Mistral / Katy Perry en lecture automatique).

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SIDESTEP: Certaines, bien conscientes de la redondance de l’exercice pourront essayer de s’en sortir par une pirouette…

– … rhétorique, comme Mademoiselle Macaron (encore elle), qui avoue être consciente de l’effet légèrement répétitif de son unboxing, une semaine plus tard, et avoue n’avoir rien à apporter au débat (lequel d’ailleurs?) mais tel un Guy Roux en jupette, doit se dire que ce serait dommage de gâcher ces belles photos sur fond de canapé gris, ses impressions en Comic Sans MS, à la découverte du contenu de sa boîte du mois de mars, à thématique New York (tiens, les Oreos ont un goût de BN), et de perdre ainsi les précieux commentaires l’insérant à une communauté unie et solidaire.

– … polémique, comme Emma, de Un blog une fille qui pose les vraies questions qui fâchent, en réponse au mécontentement de certaines quand une Little Box faisait “découvrir” les vernis Essie. Namely, nous sommes toutes devenues des peine-à-jouir de la manucure depuis que Beauty Monop’ a scoré Essie et OPI et qu’on peut acheter des Oreo à prix d’or au MK2 Bibliothèque. La mondialisation vue au prisme d’un flacon de vernis, “avec une box dénommée “New-York”, avec des supers produits dedans, collant au thème, nous n’arrivons même plus à nous en réjouir parce que nous ne savons plus que ces produits ne sont pas de chez nous.” – blame it on the World Trade.

– … enfin, les plus fantasques iront jusqu’à se jouer de l’accumulation de ces coffrets, en proposant une seconde vie à ceux-ci  via un tuto pratique et malin. Un meuble, dude. Fait avec des Little Box vides. Mais… GENIE !

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“La répétition est une des plus fines fleurs de la rhétorique”, disait Raymond Queneau (programme de mon Bac, ça nous rajeunit pas), c’est peut-être ce qui justifie cet engouement un peu déviant pour ces unboxings qu’il faut voir comme autant de variations sur le même thème. Evidemment, je parcours tout ça avec un petit ricanement un brin condescendant. Pourtant, ces litanies de posts permettent aussi de rappeler à quel point bloguer, ce n’est pas forcément vouloir marquer le monde de son empreinte et se penser suffisamment au-dessus de la mêlée pour avoir son mot à dire ; c’est parfois aussi vouloir faire partie d’un mouvement, être le nano-élément qui forme un tout chargé de sens (oh, sans ironie, je le pense vraiment, et je trouve ça plutôt chouette)(par contre, faire partie d’un tout uni par les macarons et le comic sans, ça il te faut pas faire, fieu).

37 thoughts on “Anatomie d’un unboxing beauté.

    • C’est parce que mon APN a plus de pile et la coque iPhone illustrée par Kanako masque en partie l’objectif de mon téléphone. Bummer.

  1. Et encore t’es pas allée sur beauté-test… c’est encore mieux. Elles vont jusqu’à repérer celles qui utilisent les photos des autres sans verser des royalties.

    Moi je m’en fiche dans ma dernière littlebox j’ai eu l’huile sèche et d’autres l’ont pas eu. Et tac.

    Et les vidéos aussi, les vidéos anti-glossybox c’était incroyable. Il faudrait faire une étude là dessus aussi. Genre Youtubeuses de France et Navarre united !

    • J’ai vu des vidéos, et ça m’a mise encore plus mal à l’aise que les hauling de Walinette, alors je sais pas trop quoi faire… Par contre, moi j’ai pas eu l’huile sèche, je pense que je vais gueuler. Scandale.

    • Mais totalement ! Et celle qui fait genre Lucida Calligraphy. Ces gens n’ont rien pigé au précepte American Apparel du less is more, tout Helvetica…

      • Ah, vaste débat, les polices.
        Si je me trompe pas, le less is more version sans serif, avec connotation de “moderne” et “less is more” est ancien (la police du métro de LDN en est un des modèles et des jalons – créée au début du XXè).
        (Et le less is more version avec serif et l’idée que la police de caractère ne doit pas se voir/se repérer c’est encore plus ancien : c’était l’image des polices françaises. Mais c’est pas le même less is more).

        • Tu m’as perdue, un peu, mais ouais, la police du métro de londres, elle est très épurée, en effet. Et un peu de franchise en ce bas monde : c’est QUOI la différence avec ou sans serif ? Je suis sûre que tu sauras me répondre.

          • Ouais c’était pas clair.
            Bon : la police du métro de LDN, créée dans les années 1910 c’est LA police moderne, épurée, modèle de beaucoup d’autres dans le style.
            Avec / sans serif = avec ou sans empattements sur les caractères = avec ou sans les petits rebords, retours, bitougnious sur chaque lettre.
            Sans serif : polices nettes, caractères droits, sans retour > Arial, helvetica.
            Avec serif : avec petits retours > Times New Roman ; la police de ton blog.
            (voir le p : c’est assez clair sur le p).

  2. Je m’endormirais moins bête ce soir : je n’avais juste aucune idée de l’existence de ce “phénomène” – et encore moins du “produit”. Fou !^^

  3. J’adore! Ca me gave tellement ces deballages “dans les conditions du direct”. Le seul intérêt : voir les autres combinaisons de box pour voir si on s’est fait arnaqué ou pas ce mois ci ;) Je suis pas contre le concept des box beauté, mais pour les blogueuses, je trouve que c’est un article facile pour meubler :
    – soit un descriptif (mais sans avis, puisque pas testé)
    – soit un coup de gueule easy
    Bref, ça sert pas à grand chose mais ça occupe

    • A la vérité, la raison d’être de l’exercice m’échappe encore, puisqu’elles font ce déballage façon “découverte” alors qu’elles savent pertinemment que les autres personnes susceptibles de les lires auront eu strictement la même chose. Le néant de la création. J’y vois du networking, mais ça reste maigrichon.

    • Dans de la terracotta, après avoir fait brûler des bougies senteur lavande de l’Occitane (Little Box de février) en guise de cierge.

  4. Ah cette pub Zalando, quelle grosse connerie machiste ! –
    Quant à l’unboxing, je m’en étais tenue éloignée – j’avoue, la récitation version chapelet “j’ai reçu, ça et ça et ça…” ça m’endort- mais ce qui m’émeut c’est la violence des échanges sur les murs des pages facebook de toutes ces boîtes. A croire que certaines guettent leur facteur le couteau entre les dents…

  5. moi, c’est le ‘je voix plus l’avantage’ que tu nous as brillamment écrit dans cet article qui m’écoeure le plus. Virgo, non, dis moi que t’étais saoûle ou qu’on t’a mis un flingue sur la tempe pour nous faire saigner des yeux ainsi.
    mince, et je n’ai même pas de box à échantillons pour une petite crème réparatrice ;-)

  6. J’adore!
    J’avoue que j’avais prévu de parler de ces box, j’ai fait un tas de photos pourries avec mon téléphone, j’ai même commencé à écrire et puis je me suis dit non, c’est ridicule, c’est moche, inintéressant et tout le monde le fait déja. J’ai renoncé et la lecture de ton post m’a confortée dans ma décision.

  7. Je n’avais pas encore capté que c’était un phénomène, ma balance commerciale (I mean, de lecture) se situe entre les blogueuses mode et les blogueuses lifestyle. Et encore, elles m’agacent toutes sauf Wali pour des raisons qui lui échappent.
    Bref, je trouve ça fascinant.

    • les blogueuses mode m’emmerdent trop, maintenant, alors j’essaie de diversifier. Franchement tant d’univers insoupçonnés, c’est encore plus vaste que le Marvelverse !

  8. Meuf,
    Je me contrefous pas mal de ces beauty box. Mais rien que pour ces deux citations sublimes, ton post vaut le détour :
    Super quote 1 :
    “Rule #1 of the Beauty Box: you don’t talk about the beauty box.”
    Super quote 2 :
    “par contre, faire partie d’un tout uni par les macarons et le comic sans, ça il te faut pas faire, fieu”

    Jajaja.

      • Ah oui, mais pas de problème hein. T’as fondamentalement le droit de trouver ça cool de les recevoir. Je parlais pour moi – et plus précisément, je pense que j’aimerais aussi ces Beauty Box si j’en recevais, je pense que je trouverais ça cool d’en recevoir puisque j’aime bien les produits de beauté –
        c’est plutôt que ça m’est assez égal d’avoir un avis dessus en tant que c’est “une chose qui se passe”.
        C’est ce que j’entendais par “contrefous”.
        (Suis-je claire?)

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