L’autre jour, en regardant un re-run des documentaires Arte sur les années 90, j’ai appris que Live Forever d’Oasis était un genre de fuck off subliminal au grunge et aux pulsions suicidaires de Cobain.
Ca m’a rappelé ce calendrier Nirvana que j’avais acheté quand j’avais 13 ans, c’était au magasin de disques principal de Wiesbaden pendant le voyage de classe en Allemagne, les corres’ nous avaient emmenées au centre commercial avant qu’on aille se gaver de glaces dégueu parfumées aux colorants industriels. Le lendemain, on irait visiter Mayence et j’essaierais de faire des selfies ratés parce que j’étais fière d’arborer une parka Naf Naf bleu foncé mais j’osais pas demander aux copines de me prendre en photo. J’y connaissais pas grand-chose à l’époque, mais je me disais que ce calendrier était une manière comme une autre de me faire bien voir – essentiellement de l’ado pénible qui préparait son bac dans la chambre juste à côté de la mienne, à la maison – attitude symptomatique de meuf qui écoutait Ace of Base trois semaines plus tôt. Et puis une photo sur deux exhibant la gueule d’ange de Kurt, envie de mourir ou pas, ça me convenait. Avec le recul, je comprends bien que c’est à cause de ce genre de produit dérivé qu’il s’était défoncé le cerveau à coup de carabine.
En fin d’année, le “I Hate Myself & Want to Die” de décembre arrivait à péremption, alors je l’ai remplacé par un calendrier Oasis acheté au Soho du centre commercial Vélizy II. Je me pensais edgy et puis, pour une fois, j’avais acheté Morning Glory à sa sortie (et volé Definitely Maybe à mon frère l’année d’avant)(tant pis pour lui, c’est lui qui avait commencé) [EDIT de 19h27 : je viens de chercher, il est introuvable, ce salaud m’a re-volé Definitely Maybe !]. Cette fois-ci, il n’était donc pas question de posture. Et puis je commençais à écouter Ouï FM, je trouvais donc tout ça super cohérent avec moi-même et avec le zeitgeist. Je m’suis trouvée, je pensais (nonobstant le Soho de Vélizy II). Aux oubliettes, les soirées de 5ème passées à veiller devant Dance Machine. Bien entendu, la posture n’était pas si loin et reviendrait deux ans plus tard quand, à la faveur d’un Be Here Now foirax, Blur gagnerait la guerre et que je ferais semblant d’avoir été team Damon toute ma vie, même si en vrai, j’ai toujours ce demi-sourire au coin des lèvres quand j’entends Supersonic et Liam restera toujours mon demi-dieu prolo, pour l’amour de mes 13 ans.
Rétrospectivement, faire se succéder un calendrier Nirvana et un calendrier Oasis sur un mur de chambre d’adolescente au papier peint rose rayé est un bijou de sacrilèges successifs. C’est aussi un parfait résumé conjoncturel des années 90.