Ma vie, c’est comme un film de Jean-Pierre Jeunet…

… c’est juste que l’image est moins jaune crade-Abbesses. :shudder:

Depuis que je suis revenue des Etats-Unis, je me prépare peu à peu un ulcère mutant qui risque de me rendre inutilisable pour les 30 prochaines années. Si je résume ces 2 derniers mois: j’ai appris qu’on me passait en contrat à mi-temps, réussi finalement à repasser à plein temps, puis je me suis fait voler mon téléphone, mais j’ai fait jouer mon assurance, mais j’ai appris qu’elle refuserait frauduleusement de me couvrir, mais j’ai réussi à obtenir gain de cause, puis j’ai trouvé un logement, mais ça n’a pas marché, mais la fille a voulu m’arnaquer de 350€, mais j’ai réussi à l’en empêcher, mais elle m’a volé un colis qui m’était destiné, mais j’ai réussi à le récupérer. Oh, et puis je me suis fait mi-agresser dans le métro, aussi, mais ça s’est bien terminé. Oh, Paris…

Finalement, tout va bien mais je suis dans un état relativement proche de l’Ohio, je dirais.

En attendant, hier, entre un cours annulé à la fac et un rendez-vous pour récupérer le colis qui m’avait été volé, c’est aux Deux Moulins qu’on s’est retrouvés avec les copains à tuer le temps, ce café de la rue Lepic immortalisé par Jean-Pierre Jeunet et situé avec beaucoup d’à-propos entre le Moulin Rouge et le Moulin de la Galette.

Ce café qui est censé incarner si bien la bonne franquette parisienne auprès de nos amis les touristes. Et c’est vrai que j’ai jamais vu autant d’objectifs et de flashes au mètre cube. C’est que l’endroit ne se prive pas de nous rappeler subtilement sa place dans l’économie du cinéma français et de l’identité montmartroise.

Il y a une affiche du Fabuleux Destin d’Amelie Poulain. Il y a une reproduction du nain de jardin d’Amélie Poulain. Les sets de table sont à l’effigie d’Amélie Poulain. Les assiettes de fromage et de charcuterie sont appelés “les plateaux d’Amélie”. Pour tout vous dire, je m’attendais à trouver un sosie hypocondriaque d’Isabelle Nanty qui ferait la tronche en vendant des clopes (ce n’est pas arrivé – mais c’est dommage).

La seule chose qui me chiffonne, c’est que ces photographes en herbe étaient un peu trop équipés d’un matos à une brique et suffisamment peu d’obédience japonaise pour qu’on en déduise qu’il ne s’agissait pas de simples touristes.

Tout y est passé, dans ce café si typique de la vie parisienne: le menu, le cappuccino, la main sur la tasse de café, l’auréole de la tasse de café sur la table, la fille en train de boire un café, la fille avec ses copains en train de boire un café, la fille qui fait semblant de retrouver un pote au café, pour boire un petit crème, tant de clichés du quotidien dérobés et capturés sur argentique (ou sur carte mémoire à vrai dire, mais ça sonne moins Jeunet-friendly). Multiplié par les 30 groupes de clients qui ont dû passer les portes du troquet en 2h30 d’attente (2h30 d’attente – un jour, je vous raconterai comment Sarah a bien mérité que mon pote se lâche d’un énorme “putain mais elle est MOCHE en plus!” après qu’elle m’a fermé la porte au nez). Tant et si bien que j’ai bien peur que ce soient des gens qui “font de la photo”, ou pire, des wannabe blogueuses mode, ou encore pire, des wannabe blogueuses mode qui “font de la photo”. Ce constat n’est même pas assez surprenant pour être totalement navrant.

La chose assez étonnante, dans cet endroit, c’est que je pense bien qu’on était les seuls, avec les copains, à être là juste pour boire un verre parce que c’était à 3 pas de mon lieu de rendez-vous. (on faisait couleur locale, on était sympa)

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Nom d’une pipe en bois… C’est. Juste. Un. Café.

Elle s’appelait Sarah

Si je devais en vouloir aux Etats-Unis pour une chose, c’est d’avoir altéré mes critères de jugement du rapport fonctionnement/méfiance. Quand je disais l’autre jour que la France n’était pas encore assez aguerrie aux pratiques de colocations, j’étais bien en-dessous de la réalité, voyez-vous.

Tout à ma joie d’avoir enfin trouvé un logement, une ligne de métro, un moulin rouge et un bar de quartier où boire des demis frais, je n’avais pas pensé l’espace d’un instant que la personne qui mettait deux de ses chambres en location avait pu avoir l’idée saugrenue de louer lesdites chambres pendant 3 mois sans renouveler son bail, de s’engueuler avec ses colocataires et de se retrouver fort dépourvue quand la bise fut venue.

Fort dépourvue = 4500€ de loyers impayés.

Pensant que son agence immobilière faisait une erreur en ne renouvelant pas son bail après le 29 juillet, elle a pensé pouvoir vivre 3 mois en plein Montmartre aux frais de la princesse. Il y en a qui visiblement pensent que vivre rue Lepic vous transpose forcément dans un film niais de Jean-Pierre Jeunet.

Me voilà donc médusée, devant une agente immobilière hilare, qui m’explique que je dois co-signer un bail prenant effet au 1er août 2010, lors même que je n’emménagerai qu’en novembre, me rendant responsable des 3 mois d’impayés si je veux coller mon affiche de Lloyd Dobler sur le mur nord de la chambre de droite.

Et ma gentille Sarah de m’expliquer que c’était à l’agence de renouveler son bail après tout, et que l’erreur vient d’eux mais tout va bien, car son ex-coloc, celui qui la déteste, lui a écrit: il dit qu’il ne lui donnera rien à elle, mais qu’il enverra un chèque à l’agence si l’agence le lui demande (cette agence ignore jusqu’à son existence). Et puis comme l’agence est en tort, elle ne peut pas être expulsée. Tout va très bien, Madame la Marquise, tu crois pas, toi? Je crois que depuis Lindsay Lohan niant avoir pris de la coco après la publication de cette photo, je n’avais jamais vu quelqu’un d’aussi auto-entretenu dans ses illusions et dans la non-responsabilité de ses actes.

C’en aurait presque été attendrissant si elle n’avait pas voulu me retenir un chèque de 350€ et si je n’avais pas dû faire opposition dessus. Je crois que j’ai commencé à vraiment lui en vouloir quand j’ai compris que je ne verrai jamais la couleur du Marc Jacobs Kelsey que j’ai eu l’idée géniale de faire livrer à son adresse, en guise de premier colis reçu dans mon nouveau chez-moi.

En moins de temps qu’il n’en faut pour dire “stupide”, me voici à écrire un mail moralisateur à cette pauvre Sarah, lui expliquant par a+b le marasme financier auquel elle s’expose, son idiotie crasse et qu’aucune personne d’un minimum de bon sens ne sera charitable au point de s’impliquer dans son merdier et d’alléger la charge mensuelle de ses loyers, si canon son appartement soit-il. Et il l’est. (canon)

J’agrémente le tout de “je ne pense pas que tu sois malhonnête, mais par contre t’as pas inventé l’eau chaude”, me rendant bien compte que je tire sur une ambulance par pur esprit de vengeance et de soulagement. Je crois qu’entre ça, l’opposition faite sur mon chèque alors qu’elle est dans le rouge de plus de 2000€, et mon projet secret de bondir sur son appartement une fois qu’elle aura dû fuir sans laisser d’adresse, ça va me coûter cher en piècettes données aux Yougo faisant la manche dans le métro, pour me racheter un karma à peu près décent.

Mais comme le dit cette phrase très à la mode, ces derniers temps: it gets better.

T’as qu’à voir pour Lindsay Lohan, justement: quand elle sortira de rehab pour la 5e fois, avant son 4e séjour en prison, elle trouvera un monde complètement transformé dans lequel Perez Hilton aura cessé de l’insulter, et de la renommer Lindsanity, LezLo, ou Lindsay Hohan, en même temps qu’il a fait sa profession de foi de blogueur ex-connard néo-humain – ça veut bien dire qu’au Paradis des gens idiots, les choses s’améliorent toujours un peu.

RIP

70 rue Lamarck
75018 PARIS

Tu remarqueras, en photo 1, qu’on voit la lumière du jour : pas banal pour un appartement situé au premier sous-sol (situation très embarrassante quand on te livre un colis). En photo 2, tu observes dans l’ordre : un diplôme, un bouquin sur Jeff Wall, une Bible (en édition de poche), un Van Gogh/estampe jap. Les céréales Spider Man, de la photo 3, sont infâmes. Tu remarqueras, en photo 4, que j’avais une nymphe dans ma salle de bains. On peut pas dire ça de tous les appartements parisiens.

Franchement, faire un post plus personnel, je pourrais pas.

Nobody puts Baby in a corner

Ca va être greluche. Mais pire.

J’ai un vice. Oh rien de bien grave, je reste une oie blanche dans l’ensemble. Mais j’ai un vice. Les peopleries. C’est une drogue, c’est affreux. L’autre jour, Perez H., qui est presque mon idole du virtuel, annonçait une “nouvelle dont on se fout” (c’est la définition officielle de “peoplerie”) : Patrick Swayze est atteint d’un cancer du pancréas, il n’en a plus pour 5 semaines.

Pour la moitié qui s’en fout de Patrick Swayze, pas la peine de lire plus loin. Quoique non, restez mes mignons.
Je m’explique : Patrick Swayze, quelque part, on s’en fout.
Acteur de seconde zone, qui a brillé à la fin des années 80, au début des années 90 pour ses rôles de “minet-à-ado” dans 3 films, en gros :
Dirty Dancing, rôle d’un mono de danse au muscle saillant, qui se fend d’un petit détournement de mineur entre deux mambos, qui danse en pantalon moulax noir – pour le folklore années 60 – et torse nu. 1987, l’homme objet dans toute sa splendeur.
Ghost, rôle de l’amoureux qui s’envoie sa meuf en faisant de la poterie tellement qu’il l’aime et qui revient de l’au-delà pour lui redire combien tellement qu’il l’aime. Le muscle saille moins, le jeu est encore plus monolithique, et la sexyness de Patrick tient avant tout à son rôle de golden-boy new-yorkais qui habite TriBeCa dans un loft de FOLIE (rien que de repenser à ce loft j’en mouille ma culotte, voyez-vous). 1992, le lover.
Point Break, rôle de gourou altermondialiste fan de surf et un brin bad boy (il braque des banques). Là, on salue l’ingéniosité des costumiers d’avoir fait à Patrick une coiffure qui lui tombe sur les yeux, ça évite l’embarras face à l’inexistence de son regard. 1993, l’époque à laquelle on pense encore que surfer, c’est cool, on se pose pas la question de la conversation du gonze.

Visuellement, ça donnait ça :

Fugace, la carrière. Mais après ça, combien de nanas ont essayé de s’entraîner à faire “la danse de la fin” de Dirty Dancing dans les boums? Des fois qu’un jour elles croisent Patrick, elles seraient préparées. Combien de mecs ont emballé sur Unchained Melody dans ces mêmes boums? Laissez tomber, si les nanas fermaient les yeux en vous embrassant, c’est parce qu’elles imaginaient Patrick S. et ses bras musclés les soulevant comme des brindilles pour leur faire l’amour fougueusement dans un loft de 200 m2 sur TriBeCa.
Bref, tout ça pour dire à quel point ces personnes avec lesquelles on a grandi mentalement en viennent à prendre un peu de place dans nos coeurs. Pas forcément beaucoup, hein. Quand c’est beaucoup, ça s’appelle être fan. Quand c’est trop, ça s’appelle être psychopathe. Mais sans tomber dans le fanatisme ou la folie, ce sont des personnes (personnages?) qui ont compté. Quelque part, on les a oubliées, remisées dans le coin “niaiseries adolescentes” de notre cerveau, ce coin qu’on dépoussière avec nostalgie de temps à autre (souvent pour moi). Mais par ailleurs, quand on les perd définitivement, sans avoir la même tristesse que quand on perd un proche, on se rend compte que c’est un repère de notre enfance/adolescence qui s’en va. Et grandir, des fois, c’est chiant.

Alors oui, la maladie de Patrick Swayze, on s’en fout, c’est certes cruel mais pas forcément plus que ce qui a touché Chantal Sébire, après tout. Mais Patrick Swayze, j’ai dû m’endormir un paquet de fois en rêvant à lui quand j’avais 12 ans. Je ne parle donc pas de l’alcoolo fumeur compulsif au visage ravagé qu’on voit aujourd’hui, mais bien d’un Johnny Castle ou d’un Sam Whitman. Ca en fait presque un proche, un ami de la famille – celle qui est dans ma tête. En somme, la mort annoncée d’un fantasme d’adolescente, c’est aussi nous rappeler que tempus fugit, et ça c’est vachement triste, des fois.