Serendipity, c’est le heureux hasard. C’est aussi sans doute un des plus jolis mots anglais (alors que sa version française, sérendipité, sonne très très faux). Ça a d’ailleurs été élu un des mots les plus intraduisibles de la langue anglaise, mais dans le fond, j’aimerais savoir qui préside à ces attributions? Par exemple, qui décide que locavore est le nouveau mot le plus ridicule de 2008? (il avait raison)
En novembre dernier, quand ma copine Shanna s’est fiancée, j’ai été drôlement émue. Pour tout vous dire, si j’avais pas dû retourner en France avant le Jour J, j’aurais accédé au statut tant recherché (du moins par Katherine Heigl dans une rom-com un peu nulle) de demoiselle d’honneur. Mais l’autre sentiment qui m’a parcourue, c’était cette émotion de jeune oie encore un peu trop bercée de films à l’eau de rose: Shanna connaissait alors son fiancé depuis un peu plus d’un an, et avait commencé à sortir avec 6 mois avant qu’il ne pop the question. Tant de hâte, tant d’enthousiasme, c’était communicatif, et let’s face it: a bit of a crush in the air, now. Histoire de bien achever de nous éclabousser leur bonheur au visage, le save-the-date prévu par Rob et Shanna, c’était une photo de 2007 où Shanna, fraîchement arrivée à New York après avoir gradué de Washington College, passe un de ces samedis soirs on-ne-peut-plus anodins dans un bar totalement oubliable du Lower East Side. Elle s’adonne au rituel photographique que je ne présente plus, immense sourire accoudée au bar, à côté d’une amie plus moche qu’elle. La fine fleur de la jeunesse américaine. La photo finit sur Facebook le lendemain, parmi les milliers de photos du même genre. Seulement, quand on a trop de photos de soi en train de sourire à moitié bourrée dans un bar vaseux de Lower Manhattan, il faut pratiquer un deuxième rituel, tout aussi typiquement américain: tous les 6 mois, il faut détaguer les photos anciennes, parce que ton Facebook, c’est ta vitrine, et si tu as 1750 photos de toi taggées, ça fait try-too-hard. Donc loser. Hum. Flashforward, retour en novembre 2009. Ma Shanna, fraîchement fiancée, et profitant d’une après-midi pluvieuse où elle ne travaille pas, décide de détagger un peu ses photos un peu anciennes. Arrivée à l’album “Summer 2007 NYC”, elle tombe sur la photo sus-mentionnée. Sourire immense, accoudée au bar, à côté d’une copine moche. Le détail qu’elle remarque en regardant de plus près, c’est qu’à l’angle bas/droite, à côté de la copine moche, un groupe de buddies trentenaire est apparemment en pleine discussion NFL. Parmi ce groupe de buddies, Rob, son fiancé, se trouve donc à quelques centimètres d’elle. Just another Saturday night in New York City. Comme le faisait remarquer Rob, Of all the gin joints in all of New York City, and of all the nights, girl just happened to be standing in this one gin joint, on this particular night. And at the very moment this picture was snapped, there was her future husband standing just a few feet away.
Le save-the-date, c’était donc cette preuve indéniable que Rob et Shanna s’étaient croisés et avaient même passé une soirée côte à côte dans un bar, sans se connaître, sans avoir d’amis communs, sans s’être adressé la parole ou regardé, sans même imaginer que 3 ans plus tard, ils seraient sur le point de se dire oui dans un entrepôt de Long Island City réaffecté en salle de fêtes pour hipsters un peu cossus. Continue reading